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Episodes avec l'éditrice: Suivant (#97)



Il y a deux sortes d’éditeurs : ceux qui ne lisent pas les manuscrits qu’ils reçoivent, et ceux qui ne lisent pas les manuscrits qu’ils publient. Visiblement, Mme Rey fait partie de la deuxième catégorie…



Chaque année, des dizaines de milliers d’auteurs échouent à se faire publier. Je ne vais pas être démago et prétendre qu’ils le mériteraient tous : parmi eux, il y a 50% de retraités qui racontent leur carrière d’employé de GDF - non, je ne dirai jamais « Engie » - et 40% d’adolescentes qui se plaignent qu’Eden les aient plaquées à cause de leurs règles. Mais enfin, il reste 10% d’auteurs dignes de ce nom.

Un éditeur reçoit en moyenne 5 000 manuscrits par an. Un éditeur dédie en moyenne une personne, une demi-journée par semaine - grand max - à la lecture des manuscrits reçus par la Poste. Comment voulez-vous qu’en deux heures, ce forcené lise 110 manuscrits ? C’est absurde. On ne s’étonnera pas que dans ces conditions, un éditeur publie en moyenne… 2 nouveaux auteurs par an. 2, sur 5 000.

Le reste de la production livresque - « littéraire » serait un gros mot - est constitué d’auteurs déjà célèbres et de starlettes éprises d’une soudaine fièvre biographique - de Drucker à Nabilla en passant par Françoise Laborde. Inutile de dire que les starlettes n’écrivent pas : elles font écrire, par des anonymes mal payés qui portent le nom de « nègres » et pour lesquels, il faut bien le dire, c’est la galère.

Sauras-tu classer ces 5 daubes de la plus merdique à la plus chiante ?

On ne peut pas en vouloir au pauvre employé - que dis-je ! - au pauvre stagiaire à 400 € qui doit lire ces 110 manuscrits par semaine, en deux heures, et travaille le reste de la semaine à des activités plus rentables - la mise en place du dernier Marc Lévy, par exemple. Mais on DOIT en vouloir aux grands patrons de l’édition, qui savent très bien que leur manière de travailler ne leur permet pas d’accomplir leur mission et ne font rien, rien du tout, pas une action correctrice depuis cinquante ans pour améliorer leur manière de fonctionner. A cause d’eux, pendant que Raphaëlle Giordano donne des leçons de vie à deux balles chez Ruquier, quelques dizaines d’auteurs talentueux crèvent silencieusement en France malgré un travail de qualité. Et c’est autant de livres qui, s’ils étaient publiés, nous feraient grandir.



En ce bas-monde, rien n’échappe à l’impératif de rentabilité… Et certainement pas l’édition. Et c’est un drame.

Michel de La Teigne

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