Il en faut, de la patience, pour faire ce métier... 16 minutes et 48 secondes de Mike Brant. Heureusement que Pierre-Féline n'habite pas loin de Boulogne !
Je me souviens bien du jour où Mike Brant s'est suicidé. J'étais un adolescent aussi chevelu que lui - mais bizarrement, moins adulé par les filles. Je peine à l'expliquer, d'ailleurs : j'étais très beau, moi aussi... Mais si ! Puisque je vous le dis !
A l'époque, je m'étais beaucoup moqué de lui, je le confesse. Se donner la mort parce qu'on ne vous fait chanter que de la guimauve pour midinettes... J'avais envie de lui crier : « Laisse-moi t'aimer Mais pourquoi tu ne t'es pas rebellé, Mike ? Il te suffisait de dire ce que tu voulais ! Que tu voulais apprendre la musique, l'art de la nuance, et qu'on te présente des auteurs-compositeurs compétents ! »
Et puis, j'ai réfléchi. J'imagine que le système était simplement plus fort que Mike Brant. Du début à la fin de sa carrière, il n'a pris aucune décision : il n'était qu'un pion, un produit humain aliéné par une industrie musicale assoiffée de rentabilité. Chante-ci, porte ça, dis ceci en interview, fais des concerts là et là, laisse les croire que tu es célibataire, et on vendra des millions de disques. Un individu jeune, sans doute influençable, trop faible pour s'imposer face à un système rôdé à servir des intérêts financiers. Cette aliénation s'est muée en mal profond de reconnaissance, et le ténor aux refrains poisseux s'est jeté du sixième étage de son appartement.
C'est un parfait exemple d'une thématique qui me tient à cœur : l'individu contre le système. Il faut une force de caractère colossale pour s'opposer, tout seul, à un système puissant. Les lanceurs d'alerte du renseignement américain, par exemple, sont de véritables héros à mes yeux : ils ont été prêts à tout perdre pour dénoncer un système odieux. Et ils ont effectivement tout perdu : les conditions de vie de Snowden en exil, d'Assange en cavale et de Manning en prison n'ont rien d'enviable... Oui, mais ils ont atteint le système en plein cœur.
Et ce n'est pas si surhumain, en fait, de s'élever contre le système. L'héroïsme de ces trois-là n'a rien de magique ou de sacré. Il découle simplement de leur indépendance d'esprit et de leur honnêteté - même pas vis-à-vis des autres, mais vis-à-vis d'eux-mêmes. Ces qualités sont les plus précieuses dans un monde gouverné par des systèmes omnipotents.
Vous avez des gosses ? Apprenez-leur à cultiver leur esprit critique. Rien ne sera plus utile à l'humanité au XXIème siècle. En plus, vous leur éviterez de finir comme le pauvre Moshe.
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