Sur internet, quand j'ai tapé « sortir de la prostitution », on m'a tout de suite proposé « sortir de la prostitution par la prière ». Saleté divine ! C'est si désespéré que ça ? La prière, c'est quand même le dernier recours, quand tu es dans un avion en flammes, ou que tu as fait l'erreur d'épouser Diam's !
J'aimerais beaucoup aider Alimatou. La « sauver » - c'est l'expression qui me vient spontanément, en constatant que la prostitution n'est pas un gage de bonheur. Dans un film comme le mielleux Pretty Woman, je lui proposerais de dormir chez moi le temps de « se retourner » - expression assez maladroite, j'en conviens. Le problème, c'est que le regard d'Hollywood sur la prostitution est aussi éloigné de la réalité que les publicités Cochonou le sont du bien-être animal...
Les associations qui aident les prostituées à se « reconvertir » affirment que c'est compliqué. Il y a la question financière, évidemment : il n'y a pas d'assurance-chômage dans le milieu, mais il faut quand même payer les factures. Et je ne voudrais pas qu'en hébergeant Alimatou, elle se sente redevable d'une dette envers moi, qu'elle chercherait à me régler en nature... La possibilité que cette idée traverse son esprit, suffirait à ruiner la sincérité qui existe entre nous. Je ne veux pas tout fausser.
Une autre montagne à franchir, c'est, bien sûr, l'angoisse du lendemain, du bouleversement de vie ; la nécessité de construire un projet dans un autre métier. Je doute d'ailleurs qu'Alimatou ait le droit de travailler légalement en France... Et je ne sais pas ce qu'elle sait faire d'autre. Je lui demanderai.
Il y a encore la question du proxénète, des dettes éventuelles à lui régler, du préjudice pour lui de perdre une source de revenu. D'après ce que je viens de lire, certains s'arrangent pour que la dette et le préjudice soient impossibles à éponger, pour s'attacher la fidélité de leurs putes à tout jamais...
Les travailleurs sociaux s’accordent à dire que c’est un très long parcours ; qu’il est possible de sortir de la prostitution en 5 ou 10 ans, mais qu’il y a souvent des rechutes, des heures sombres, lugubres, le désespoir, la dépression, la reconstruction… Je ne suis pas sûr d’être capable d’endurer cela, moi qui ai tout fait depuis mon divorce pour m’affranchir de toute attache familiale ou affective. Il faut être honnête avec soi-même.
Je parlerai de tout ça avec elle, je tâterai le terrain. Si elle me le demande, je serai son ami, je l’accompagnerai dans ses démarches, je l’encouragerai… Mais je suis un vieux libertaire. Je sais donc que la décision radicale de changer de vie, elle devra la prendre seule. Et il lui faudra une immense résolution, car je ne serai jamais assez saint pour la sauver malgré elle.
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