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Picard m’a sauvé. Une enseigne capitaliste, qui vend des glaces à l’huile de palme et au sirop de glucose, bourrées d’émulsifiants et de stabilisants chimiques, et surtout pleines d’eau - c’est l’ingrédient le moins cher. J’ai honte d’avoir été sauvé par ça.
A moins qu’elle ne m’ait manipulé, la coquine ! Peut-être que m’obliger à me justifier de ne pas vouloir de mioche, c’était une manière machiavélique de me pousser à lui offrir la glace qu’elle voulait… Il paraît qu’ils sont très malins à cet âge-là, qu’ils savent exactement comment nous mener par le bout du nez. Et quand je vois certains parents gagas, je me dis que oui, j'ai dû me faire avoir.
Elle est forte, ma nièce - normal, c'est ma nièce. Pourtant, j’aurais pu m’en sortir. J’aurais dû lui expliquer le fond de ma pensée : ne pas vouloir m’emmerder à éduquer des chiards, ce n’est que la face visible de la couche-culotte… La vraie merde est ailleurs, à l’intérieur : on est trop nombreux sur Terre. Le désastre écologique vers lequel on court est d’abord un désastre démographique. On pourrait tous rouler en 4x4, manger un kilo de viande par jour et prendre l’avion tous les mois si on n’était qu’un million. Mais on est 7 milliards à se partager le caillou - et certains ne rêvent que d’une chose : faire leur troisième gosse. C’est pathétique à en crever.
Les pauvres gens qui n’ont pas accès à la contraception et à une information de qualité sur l'écologie de la planète sont pardonnables : sans éducation, rien n’est possible. Mais ceux qui savent et dépassent malgré tout la page 4 de leur livret de famille sont irresponsables. Les religions qui persistent à leur dire de propager la vie humaine sont des temples d’obscurantisme, et les gouvernements qui financent les allocations familiales et les congés maternité assassinent tout bonnement la nature. Oh ! Je sais bien que la moitié de mes lecteurs vont me détester, parce que j’ai osé dire du mal de leur désir d’enfanter - mais je m’en fiche : au moins, ils vont commencer à y réfléchir. Une humanité intelligente encouragerait ses membres à se vider les couilles dehors, jusqu’à ce que ça se calme.
Voilà ce que j’aurais dû lui dire, à Alice : elle est suffisamment brillante pour le comprendre. Si ses parents étaient un peu plus ouverts d’esprit, je ne me censurerais pas. Mais ils ont déjà menacé de ne plus me la confier… Alors je ferme ma gueule. Et puis après tout, on le sait : tout va bien.
Michel de La Teigne