Ne vous fiez pas aux apparences : Gérard n’est pas qu’un chômeur alcoolique, obèse et fort en gueule, qui connaît chaque cm2 du comptoir de son bistro. Gérard est surtout mon ami depuis 30 ans. Un ami fidèle, qui donnerait tout pour m’aider, enfin, tout ce qu’il lui reste.
Quand je l’ai connu, il était moins abîmé (l’inverse serait inquiétant). Une vie de cadre inférieur - il y a bien des cadres supérieurs… - dans une boîte débile a eu raison de son innocence et de sa santé. Je ne lui jette pas la pierre : chacun ses vices. Un jour, je vous parlerai peut-être des miens. L’alcool, en tout cas, n’est pas tendre avec les excessifs. Et malheureusement pour Gérard, il a toujours été « trop excessif », comme disent les gens qui n’aiment pas la langue française.
Gérard boit trop, mais parfois, il a des éclairs de génie. Par exemple, la première fois que je lui ai parlé d’Alimatou, il m’a dit, je m’en souviens très bien : Cette fille-là, tu ne l’auras jamais ! avant d’éructer bruyamment. Gérard est génial de lucidité… Parce que moi, j’y crois toujours. Je m’imagine que j’ai une petite chance. Gérard, l’omniscient, a su que c’était mort dès le premier jour.
Il me conseille d’être « moins ambitieux ». Encore une fois, il a raison : qui peut nier qu’Alimatou est beaucoup plus haut que moi sur l’échelle de la beauté et de la jeunesse ? Echelle cruellement ségrégative…
Gérard a raison, mais je suis content d’être dans l’erreur. Rêver d’Alimatou me distrait, m’occupe, me laisse imaginer le bonheur. Ma vie sentimentale est moins belle que mes fantasmes. L’espoir, c’est mieux que rien.
Si vous aimez ce blog, n’oubliez pas de tiper, pour que je puisse payer un pot à Gérard ! « Il fait chaud, faut s’hydrater », qu’il dit.
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